Fermer

Établissement stable TVA : La fin de la saga ?

Accueil > Insights > Actualités > Établissement stable TVA : La fin de la saga ?

Le 13 juin 2024, la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) a rendu une décision marquante dans l’affaire C-533/22 SC Adient Ltd & Co. KG, clarifiant les critères de reconnaissance d’un établissement stable pour la TVA. Cette décision s’inscrit dans une série d’arrêts qui façonnent progressivement la jurisprudence de la Cour en matière de TVA, issue de la réforme du « Paquet TVA » de 2010.

Contexte de la réforme du « Paquet TVA »

La réforme de 2010 a introduit des règles TVA distinctes des concepts traditionnels d’établissement stable utilisés pour l’impôt sur les sociétés. Cette autonomisation des règles TVA s’est imposée dans le cadre fiscal, remplaçant l’ancienne pratique d’association systématique entre l’impôt sur les sociétés (IS) et la TVA, particulièrement dans la reconnaissance d’un établissement stable par les administrations fiscales.

Les faits de l’affaire Adient

Adient Ltd & Co. KG, établie en Allemagne (Adient DE), avait sollicité SC Adient Automotive România SRL (Adient RO), une entité du même groupe, pour des services de transformation et d’assemblage de composants de garnitures de sièges, ainsi que des services auxiliaires. Ces prestations étaient réalisées par les établissements d’Adient RO à Pitești et à Ploiești en Roumanie.

Adient DE s’était immatriculée à la TVA en Roumanie pour déclarer ses achats et ventes domestiques. Les services rendus par Adient RO étaient facturés sans TVA à Adient DE, qui déclarait cette TVA en Allemagne. Cependant, l’administration fiscale roumaine a estimé qu’Adient DE disposait de moyens techniques et humains en Roumanie par l’intermédiaire d’Adient RO, et devait donc être vue comme établie en Roumanie pour la TVA, entraînant des rappels de TVA pour Adient RO.

Décision de la CJUE : Phase 1 – Critères de reconnaissance

La CJUE a détaillé les critères pour reconnaître un établissement stable TVA, adoptant une approche restrictive :

  • Appartenance au même groupe : La simple appartenance à un même groupe ne suffit pas pour caractériser un établissement stable.
  • Utilisation des moyens du prestataire : Un établissement stable n’est reconnu que si la société cliente utilise les moyens du prestataire « comme s’ils étaient les siens ».
  • Contrat de services exclusif : Un contrat exclusif ne crée pas d’établissement stable, sauf si les moyens du prestataire sont utilisés aux risques de la société cliente.
  • Permanence des moyens : Les moyens humains et techniques doivent être disponibles de manière suffisamment permanente.
  • Accès aux systèmes informatiques : L’accès aux systèmes informatiques et comptables du client n’implique pas nécessairement une infrastructure autonome pour la société cliente.
  • Locaux de stockage : La mise à disposition de locaux de stockage n’affecte que la territorialité des livraisons de biens.
  • Autorité sur les moyens humains : Les moyens humains doivent être sous l’autorité de la société preneuse pour être considérés comme les siens.

Décision de la CJUE : Phase 2 – Territorialité et redevabilité de la TVA

La Cour a clarifié la distinction entre la territorialité de la TVA, qui détermine le lieu de taxation, et la redevabilité, qui identifie l’assujetti chargé de collecter ou d’auto-liquider la TVA.

En l’espèce, la Roumanie ne peut taxer les services rendus par Adient RO à Adient DE que si cette dernière utilise de manière permanente les moyens humains et techniques en Roumanie. La Cour a noté que l’administration fiscale roumaine n’a pas prouvé l’utilisation des moyens de la société roumaine pour les opérations de façonnage, se basant plutôt sur les opérations en aval.

La CJUE a également rappelé que les mêmes moyens ne peuvent pas être utilisés à la fois pour participer à des services ou livraisons et pour recevoir des services.

Conclusion

La décision de la CJUE dans l’affaire Adient précise les critères de reconnaissance d’un établissement stable pour la TVA, adoptant une approche restrictive pour éviter les conflits de taxation, garantir une harmonisation fiscale au sein de l’Union européenne, et renforcer la sécurité juridique pour les entreprises et les administrations fiscales.


Pour toute question ou pour un accompagnement personnalisé, n’hésitez pas à nous contacter. Nous sommes à votre disposition pour vous aider à naviguer dans le paysage complexe de la fiscalité internationale.

Prendre RDV

Voir les commentaires

Aucun commentaire

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *