Comme chaque année, le Ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation (MESRI) publie un guide d’aide aux contribuables déclarant du crédit d’impôt recherche (CIR).
Si ce document n’a qu’une valeur informative et n’est donc pas opposable au contribuable, les dispositions indiquées dans le guide constituent un bon indicateur des orientations des futures positions des Vérificateurs lors des contrôles fiscaux.
Notre expert vous livre une analyse comparative des éditions 2018 et 2019.
Brevet, dépenses de personnel, frais de fonctionnement… : des nouveautés marquantes
Concernant le modèle de trame de dossier technique publié en 2018
Le MESRI confirme la non rétroactivité de la trame pour les CIR antérieurs au CIR 2018. Ainsi, le suivi de cette trame ne peut être exigé pour les CIR antérieurs à 2018.
Concernant le brevet comme indice d’éligibilité au CIR
Le nouveau guide indique que le rejet d’un brevet pour défaut d’inventivité n’est pas rédhibitoire pour la valorisation du projet associé à ce brevet au CIR, dès lors que toutes les conditions d’éligibilité sont remplies par ailleurs.
Concernant les dépenses de personnel
Pour la constitution du dossier justificatif, il est demandé au contribuable :
- non seulement de bien justifier la qualification et l’éligibilité du personnel,
- mais également de décrire le rôle précis de chacun et ce pour chaque opération de recherche.
Le MESRI requiert en outre une justification encore plus poussée pour salariés valorisés à 100 % de leur temps ou pour un faible pourcentage.
A propos de la mise à disposition de personnel, le ministère précise que les opérations de prêt de main-d’œuvre à but non lucratif peuvent intervenir uniquement entre sociétés d’un même groupe, dès lors que la facturation s’effectue à prix coûtant.
Par ailleurs, il est recommandé à une entreprise qui fait intervenir du personnel extérieur à son équipe de le faire au travers :
- d’un contrat spécifique et encadré par la loi, de « mise à disposition de personnel ». Ces dépenses sont directement intégrables dans la partie « dépenses de personnel »
- ou dans le cadre d’un contrat sous-traitance (article 244 quater B II d, d bis et d ter du CGI).
Concernant les frais de fonctionnement
La nouvelle version du guide du CIR reprend les dispositions du projet de loi de finances pour 2020. Il est indiqué qu’à compter du CIR 2020, le taux applicable aux dépenses de personnel passera de 50% à 43% . Pour être précis le guide indique que cette disposition s’applique à compter du CIR 2019, mais nous avons eu confirmation qu’il s’agit d’une erreur de plume.
Concernant la procédure
Le guide précise les modalités de déclaration pour 2020.
À compter du 1er janvier 2020, la procédure déclarative sera entièrement dématérialisée. Avec la télédéclaration, il ne sera plus nécessaire d’adresser une copie des feuillets fiscaux au MESRI. Les données sont automatiquement transmises.
Pour l’année 2020 et pour les entreprises clôturant leur exercice au 31/12, les dates limites de déclaration sont les suivantes :
- au 5 mai pour les entreprises soumises à l’Impôt sur le Revenu
- au 15 mai pour les entreprises soumises à l’Impôt sur les Sociétés.
Concernant la procédure de demande de remboursement du CIR
Le MESRI précise que le remboursement ne vaut pas validation du CIR. Il n’empêche aucunement la tenue d’un contrôle fiscal ultérieur.
Le guide apporte également des précisions supplémentaires par rapport à l’édition 2018 sur le dépôt d’une demande de rescrit CIR/JEI. Il est également plus exhaustif sur les procédures d’obtention d’agrément.
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L’éligibilité des dépenses de sous-traitance encore limitée…rétroactivement ?
Concernant la sous-traitance, le MESRI distingue deux situations dans lesquelles le donneur d’ordre peut y recourir :
- La sous-traitance de spécialité ou complémentarité (éligible au CIR). Il s’agit du cas où le donneur d’ordre ne dispose pas des compétences adéquates pour réaliser la prestation. Le sous-traitant doit alors assumer la coordination scientifique de la prestation de recherche ;
- La sous-traitance de capacité (non éligible au CIR). Le sous-traitant est alors un simple exécutant d’une opération définie par le donneur d’ordre, ce dernier assurant la coordination scientifique de la prestation de recherche.
Le guide liste enfin les justificatifs à fournir en cas de contrôle : une fiche scientifique de chaque opération, contrat, cahier des charges, factures, relevés des points d’étapes (jalons techniques).
Notre analyse comparative
Il ressort ainsi de la comparaison du nouveau guide avec les éditions précédentes que ces précisions à propos de la sous-traitance sont potentiellement les plus impactantes pour le contribuable.
En effet, nous pouvons observer que les dispositions du guide sur ce poste de dépenses sont restrictives. Cela avait déjà été le cas dans l’édition 2015 dans laquelle le guide indiquait pour la première fois que les activités nécessaires n’étaient plus éligibles dans les dépenses du donneur d’ordre. Nos retours d’expérience des contrôles fiscaux révèlent d’ailleurs que l’administration fiscale peut suivre ces positions.
Pour rappel, le guide 2015 indiquait que pour être prises en compte dans le CIR, les dépenses sous-traitées devaient être liées à des travaux qui répondaient à la définition de la recherche éligible « pris isolément ». Or, il ressort de notre pratique des contrôles fiscaux que depuis, lors des contrôles, cette exigence est suivie par les vérificateurs et est source de nombreux contentieux devant les juridictions administratives.
En l’espèce, la précision apportée par l’édition 2019 du guide du CIR concernant la non éligibilité de la sous-traitance de capacité ne ressort ni de la loi, ni de la doctrine administrative, ni de la jurisprudence.
En effet, la loi se contente d’indiquer que sont éligibles au CIR « Les dépenses exposées pour la réalisation d’opérations de même nature confiées à … », et ne distingue à aucun moment la sous-traitance de capacité de celle de spécialité. Ce distinguo est également absent de la doctrine administrative.
Or, bien qu’en préambule il soit clairement précisé que le guide n’a pas de valeur juridique, les agents de vérification peuvent donc reprendre les positions prises par le MESRI.
Dès lors, ajouter des conditions d’éligibilité à un poste de dépenses aussi important est source d’insécurité juridique pour les contribuables. Ces derniers pouvant même être contrôlés sur des années bien antérieures à la parution dudit manuel.
Et pour conclure
Le guide du CIR du MESRI 2019 constitue une réelle aide au contribuable déclarant des dépenses de CIR, et certaines précisions apportées sont bienvenues (concernant la non rétroactivité de la trame apparue dans l’édition 2018, la possible éligibilité d’un projet non brevetable…).
Cependant, il est à craindre que les précisions sur la sous-traitance soient sources d’insécurité pour les déclarants donneurs d’ordre, et donc génératrices d’un nombre de contentieux important, comme c’est déjà le cas en ce qui concerne la non éligibilité des activités nécessaires sous-traitées.
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