Nouveau portail disponible depuis mars 2021, le Bulletin Officiel de la Sécurité sociale (BOSS) regroupera à terme l’ensemble des principes juridiques applicables en matière de cotisations sociales.
Il impose déjà aux entreprises de revoir leurs pratiques en matière de frais d’entreprise. Décryptage de notre experte Farida EL KHANTOUCHE, Consultante Experte en Ressources Humaines en partenariat avec Maître Elie GERSTNER et Maître Juliana KOVAC du Cabinet FLICHY & GRANGE.
Le Bulletin officiel de la sécurité sociale (BOSS) : un nouvel outil numérique
Le Bulletin officiel de la sécurité sociale (BOSS) a été créé, sous forme de site internet, par un arrêté du 31 mars 2021 entré en vigueur le 1er avril suivant. Il a vocation à diffuser la doctrine administrative relative aux cotisations et aux contributions de sécurité sociale, comme le BOFIP en matière fiscale.
Les cotisants doivent être vigilants. Le BOSS est régulièrement modifié et, s’il reprend l’essentiel de la doctrine existante, il comporte quelques changements importants tels que la suppression de la notion de frais d’entreprise.
La disparition des frais d’entreprise de la doctrine administrative
Le BOSS se substitue ainsi aux circulaires et instructions antérieures au 1er avril 2021. Elles cessent de s’appliquer aussitôt que des commentaires ayant le même objet sont publiés au BOSS.
Or, parmi les circulaires abrogées figure la circulaire DSS/SDFSS/5 B n°2003-07 du 7 janvier 2003 qui prévoyait l’exonération des frais d’entreprise, définis comme des « frais relevant de l’activité de l’entreprise et non […] liés à l’exercice normal de la profession du salarié ».
Ils présentent un caractère exceptionnel, sont exposés dans l’intérêt de l’entreprise et en dehors de l’exercice normal de l’activité du travailleur.
- Le BOSS ne contient cependant aucune fiche thématique, ni aucune partie ou chapitre intitulé « frais d’entreprise ». La fiche « avantages en nature et frais professionnels », ne fait non plus aucune référence aux frais d’entreprise.
- La plupart des frais antérieurement considérés comme des frais d’entreprise sont désormais considérés comme des frais professionnels. Ils sont, soit intégrés dans des catégories existantes de frais professionnels, soit traités comme des « cas particuliers ».
- Il n’existe donc plus de fondement à une exonération pure et simple des frais d’entreprise dans la doctrine administrative.
Cette évolution est lourde de conséquences, particulièrement pour les sociétés qui pratiquent la déduction forfaitaire spécifique (DFS).
Les conséquences en cas d’application de la DFS
Les professions listées à l’article 5 de l’annexe IV du Code général des impôts peuvent bénéficier de la DFS.
Celle-ci consiste à appliquer un taux de déduction propre à chaque profession à la base de calcul des cotisations de sécurité sociale c’est-à-dire au « montant global des rémunérations, indemnités, primes, gratifications ou autres acquises aux intéressés, y compris, le cas échéant, les indemnités versées au travailleur salarié ou assimilé à titre de remboursement des frais professionnels ».
Le montant de la déduction est plafonné par salarié et par année civile à 7 600 euros.
Il en résulte que :
- si la société opte pour la DFS, les frais professionnels sont intégrés dans l’assiette des cotisations de sécurité sociale et subissent l’abattement au titre de la DFS ;
- si la société n’opte pas pour la DFS, les frais professionnels sont exclus de l’assiette des cotisations, dans les limites admises pour chaque catégorie de frais.
Jusqu’à présent, les frais d’entreprise étaient exclus de l’assiette des cotisations quelle que soit l’option de l’entreprise vis-à-vis de la DFS.
La suppression de la notion de frais d’entreprise et la reprise de ces types de dépenses dans la catégorie de frais professionnels a potentiellement pour effet de les réintégrer pour leur montant total dans l’assiette des cotisations de sécurité sociale si la société pratique la DFS.
La volonté de réduire l’intérêt de la déduction forfaitaire spécifique
L’administration souhaite ainsi probablement réduire l’intérêt de la déduction forfaitaire spécifique : il semble en effet que la volonté des rédacteurs du BOSS était d’en revenir au droit commun notamment en matière de repas et de déplacements professionnels.
Cette intention est encore plus manifeste avec l’exigence, pour appliquer la DFS, que les salariés supportent effectivement des frais professionnels (BOSS n°2130), ce qui ne figurait pas jusqu’à présent dans la doctrine opposable aux Urssaf.
L’administration va jusqu’à exclure la DFS « en cas de prise en charge ou de remboursement par l’employeur de la totalité des frais professionnels ».
Cette condition est difficile à comprendre puisqu’elle impliquerait, pour appliquer la DFS, de ne pas rembourser au salarié les frais professionnels engagés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l’intérêt de son employeur.
Or, il s’agit là d’une obligation pour l’employeur. Ce point mériterait d’être clarifié par l’administration.
Demande URSSAF suite au BOSS
Selon une mise à jour récente du BOSS, jusqu’au 31 décembre 2022, les Urssaf demanderont uniquement une mise en conformité pour l’avenir aux entreprises contrôlées qui n’appliqueraient pas ces dernières conditions (BOSS n°2215). Il n’est pas précisé en revanche que cette tolérance s’appliquerait également à propos de la suppression de frais d’entreprise.
En savoir plus sur le sujet du Contrôle URSSAF avec notre Livre Blanc pour le gérer en toute sécurité.
Il est peu probable que l’Administration rétablisse prochainement les frais d’entreprise. Espérons à tout le moins qu’elle aura clarifié d’ici le 31 décembre 2022 sa position sur le remboursement intégral des frais professionnels.
En l’état, la prudence s’impose.
En partenariat avec le Cabinet FLICHY & GRANGE
Aucun commentaire