L’érosion du retail s’articule aujourd’hui autour de deux grands phénomènes : l’intégration permanente du comportement client, et l’émergence de nouveaux acteurs tels que Amazon ou encore Alibaba.
Ces derniers ont bouleversé la distribution classique en positionnant les plateformes digitales comme des acteurs majeurs de la distribution. Dans cet environnement à forte intensité concurrentielle, comment les enseignes peuvent-elles développer leur performance ?
Le marché du retail est depuis plusieurs années en pleine transformation. Pouvez-vous nous dresser un état des lieux du marché actuel ?
L’arrivée des plateformes digitales met en exergue différentes questions pour les enseignes :
- La première est sur leur logique de pénétration, dans un monde où la population urbaine ne cesse de croître. De moins en moins approprié aux consommateurs, qui souhaitent aujourd’hui optimiser leur temps et leur trajet, les modèles des hypermarchés perdent en attractivité. Ainsi, une véritable stratégie autour du canal de distribution est mise en place.
- Par ailleurs, la question de l’équité fiscale émerge dans la pérennité des modèles. Des acteurs français majeurs tels que Cdiscount ou encore La Fnac doivent s’aligner au prix de géants comme Amazon, sans pour autant avoir la même structure de coût. Les enseignes doivent ainsi proposer des offres au même pied d’innovation, sans finalement se battre à armes égales.
- La dernière question met en avant les problématiques de capacités de livraison. Aujourd’hui, le dernier kilomètre constitue une véritable bataille acharnée d’un point de vu logistique et tarifaire pour les enseignes. Comment délivrer des produits au moins cher et au plus vite devient un véritable enjeu stratégique, sans parler de la gestion des retours !
On observe également des bouleversements dans le comportement des clients. Pouvez-vous en dire un peu plus sur le sujet ?
L’activité du retail est très variée, mais on observe des comportements d’achats similaires chez les consommateurs. Le premier changement est dans l’approche philosophique de l’achat. Aujourd’hui, le consommateur est non seulement à la recherche du meilleur prix, mais il cherche également à développer un comportement d’achats éthiques. Au niveau alimentaire par exemple, il se pose différentes questions : « ce que je mange est-il bon et sain pour ma santé ? Est-ce respectueux de l’environnement ? Le commerce local ou équitable est-il valorisé ? » Ces mêmes questions se retrouvent dans le domaine du textile : « est-ce que j’exploite des enfants par le biais de mes achats ? Est-ce que je fais souffrir des animaux ? » Une véritable réflexion de la part du consommateur se fait désormais ressentir.
Il faut également s’attarder sur le moment même de l’acte d’achat. Auparavant, on accordait un moment spécifique à cette activité. Avec l’avènement du digital, on peut désormais adresser à tout moment ses besoins de consommation, ce que les industriels ont très bien compris : le moment d’achat vient désormais directement à nous. Pouvoir acheter ce que l’on veut, au moment où on le souhaite, et là où l’on se trouve, devient la seule réponse que les enseignes doivent apporter pour répondre aux besoins de leurs clients.
Enfin, une véritable personnalisation de l’offre émerge. Le client est de plus en plus sensible à la compréhension réelle de ses besoins, voire même à leur anticipation. Etre capable de proposer aux consommateurs le produit dont il rêve, voire dont il n’a pas encore connaissance est une véritable consécration pour les enseignes. Pour cela, l’exploitation de la data facilite en amont la modélisation des probables attentes clients.
Justement, comment les enseignes peuvent-elles satisfaire les besoins clients par l’exploitation du Big Data ?
Le Big Data a évolué de manière comportementale. Au départ, il s’agissait d’un traitement des données en masse : la prévision des ventes, la segmentation fine de l’offre, ou encore la connaissance des stocks. Désormais, la donnée est intégralement liée au comportement conscient et inconscient des acheteurs : comment acheter, où acheter et quoi acheter ?
Dans une logique de maîtrise d’achat individualisé, la connaissance de la data est un atout majeur. Le consommateur accepte de partager ses informations personnelles – voire n’en a pas conscience – pour déterminer son profil consommateur. Celui-ci est directement relié à une catégorie socio-professionnelle spécifique et caractéristique. L’exploitation de la donnée permet ensuite d’affiner le profil du consommateur, et ainsi déterminer les produits qu’il désire, et les autres produits similaires associés.
La data apparaît donc comme une information indispensable. Pourquoi est-elle si peu exploitée par les enseignes?
La data fait désormais partie intégrante de l’organisation. Cela demande à l’enseigne de revoir ses moyens, sa stratégie, ses compétences, voire même sa culture. Pour ce faire, elle doit intégrer les ressources humaines nécessaires pour développer ces actions, ce qui est finalement encore peu mis en place.Par ailleurs, l’exploitation des informations a un réel impact sur leur organisation. En effet, penser data revient à revoir les chaînes de commandement pour orienter les achats, évaluer les stocks, fixer les prix, cibler les promotions, etc.
En tant qu’expert, comment Ayming peut accompagner l’utilisation des data disponibles d’une enseigne ? Quelle est votre perception de l’évolution du marché du retail ?
Ayming a développé deux offres majeures pour répondre à vos besoins. Tout d’abord, la partie excellence opérationnelle, qui accompagne les entreprises dans leur plan de transformation et leur capacité à mener à bien leur plan de performance. Ensuite, grâce à notre pôle de data scientist, nous intégrons systématiquement le traitement de la donnée pour identifier et traiter divers corrélations opérationnelles non soupçonnées et vecteurs d’amélioration et d’efficacité.
Je dirais finalement que le retail est aujourd’hui une industrie où le digital est l’essence même de son fonctionnement. La concurrence est acharnée, et la connaissance client est un facteur clé de survie. Pour les enseignes, il faut désormais accepter la réorganisation permanente des systèmes. Il n’existe plus de modèles définis qui subsistera trente à quarante ans : les cycles de réorganisation se renouvellent sans cesse. Il s’agit d’une véritable transformation culturelle pour les entreprises, qui jouent leur pérennité et leur attractivité.
Cet article a été rédigé par Laurent Corbière
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