Christelle Dechelette: Bonjour, je suis Christelle Dechelette, directrice du département Performance Paie chez Ayming. J’accompagne les entreprises depuis plus de 25 ans sur des sujets tels que la sécurisation, l’optimisation des processus de paye et la gestion des aides au recrutement, notamment pour les contrats d’alternance.
Aujourd’hui, je suis ici avec Christèle pour partager notre expertise avec vous. L’objectif principal de cette discussion est de mieux comprendre, grâce à notre expérience et notre vision extérieure, les obstacles que rencontrent les entreprises dans la gestion de ces aides et comment y remédier. Christelle, à toi de te présenter.
Christèle Beuzelin: Bonjour, je suis Christèle Beuzelin, juriste de formation. J’accompagne nos clients chez Ayming dans l’obtention de leurs aides au recrutement. Je travaille notamment en lien avec les organismes financeurs pour sécuriser les processus et m’assurer que nos clients obtiennent le plein potentiel des aides auxquelles ils ont droit. Ces aides peuvent se chiffrer en millions d’euros par an pour les grands groupes.
Les aides à l’embauche pour les apprentis
Christelle Dechelette: Ton profil en tant que juriste est très intéressant pour les entreprises, pour permettre une bonne connaissance des dispositifs, une bonne veille, et vraiment avec beaucoup de rigueur et de précision, et un très bon relationnel avec les organismes sociaux qui nous sont précieux. Je t’en remercie d’ailleurs encore, et je voudrais compléter avec quelques chiffres.
Alors, depuis cinq ans, l’État a mis en place un certain nombre de mesures d’aides à l’embauche pour les apprentis.
De manière générale, et aujourd’hui pour le contrat d’alternance, il existe une aide exceptionnelle de 6 000 euros qui est versée pour le recrutement d’un alternant pour la première année. Ces aides sont encore mal connues. Aujourd’hui, environ 780 000 employeurs bénéficient de cette aide, ce qui est conséquent, mais reste assez faible puisque c’est à peine un quart des entreprises en France.
Le chef de l’État a prévu un million d’alternants d’ici 2027. Or, nous sommes déjà à un million d’alternants aujourd’hui. Donc, c’est un développement important de ce type de recrutement qui est très intéressant pour les entreprises, au-delà de l’aide, car cela permet de professionnaliser et fidéliser les jeunes.
Deux chiffres intéressants :
Deux alternants sur trois sont maintenus en poste dans les six mois suivant leur apprentissage.
Il y a des aides supplémentaires pour les salariés en situation de handicap, avec 10 000 contrats d’alternance concernés. En 2023, l’État a versé 5 milliards d’euros d’aides au recrutement. Ces aides sont précieuses pour les ressources humaines, mais il faut bien maîtriser les démarches administratives pour ne pas perdre ces aides. Christelle, tu pourrais nous en dire plus sur les autres aides disponibles ?
Les autres aides à l’embauche
Christèle Beuzelin: Oui, il existe une dizaine d’aides. La plus connue est l’aide emploi franc, versée par France Travail, qui peut aller jusqu’à 15 000 euros sur trois ans pour un CDI. Cela représente 15 % du salaire chargé pour un SMIC, donc ce n’est pas négligeable. Il existe d’autres aides qui peuvent se cumuler ou non, selon l’aide en question. Comme tu le disais, il y a les aides pour les alternants en situation de handicap.
Pour les personnes éloignées de l’emploi, il y a les CUI (contrat unique d’insertion) et les CIE (contrat initiative emploi). Ces aides soutiennent les personnes les plus fragilisées. Il y a encore beaucoup d’autres aides, mais la liste est trop longue à énumérer ici.
Christelle Dechelette: Effectivement, beaucoup de sujets à découvrir, et pour les entreprises, c’est un domaine vaste. Avant de parler concrètement de la gestion de ces aides, comment les entreprises réalisent-elles le recrutement et trouvent-elles ces jeunes en alternance ?
Christèle Beuzelin: C’est un sujet d’actualité, car les recruteurs commencent leur campagne de recrutement en mai pour recruter des alternants en septembre. Le gouvernement a mis en place une plateforme appelée « Un jeune, une solution », qui permet de retrouver des offres d’emploi par domaine, niveau d’études et localisation.
Un autre site important est le portail de l’alternance, qui permet de calculer l’aide à laquelle l’alternant a droit et le montant du salaire en fonction de la convention collective. Le site de l’APEC est aussi utile, même si on n’y pense pas forcément. Les apprentis ne sont pas limités par l’âge pour obtenir l’aide.
Christelle Dechelette: Ah oui, c’est important car les contrats de professionnalisation le sont. Certaines entreprises ont été déçues car elles étaient bloquées par ce point. Chaque point est crucial.
Une autre difficulté pour certains secteurs est d’identifier les jeunes car ils ont des métiers très spécialisés et la mise en relation avec les écoles n’est pas évidente, surtout quand elles ne sont pas à proximité. Par exemple, le secteur de la santé est très touché par cette difficulté.
Christèle Beuzelin: Oui, la difficulté vient surtout du rythme de l’alternance. Les établissements de soins ne sont pas forcément en lien avec les écoles, et le rythme de travail des alternants est compliqué à gérer avec le planning des soignants. Ce n’est pas toujours compatible.
Christelle Dechelette: Pour conclure, la mise en relation entre les entreprises et les écoles est vraiment déterminante. Il y a vraiment un sujet à développer là-dessus. Quelles sont les autres difficultés rencontrées par les entreprises ?
Christèle Beuzelin: Il y a une règle importante à connaître pour les entreprises concernant les aides à l’alternance. Les entreprises de moins de 250 salariés peuvent bénéficier de ces aides sans condition particulière. En revanche, celles de plus de 250 salariés doivent respecter un quota : elles doivent recruter au moins 5 % de leurs effectifs en alternance pour être éligibles.
Cette condition doit être remplie chaque année. Toutefois, une entreprise qui atteint 3 % d’alternants, mais qui a progressé de plus de 10 % par rapport à l’année précédente, peut aussi bénéficier des aides.
Quels sont les délais pour obtenir les aides à l’embauche pour les apprentis ?
Christelle Dechelette: On voit souvent que les entreprises qui n’ont pas l’habitude de recruter des alternants ne connaissent pas ce seuil et peuvent se tromper dans leurs démarches. Il est donc crucial de les informer et de les sensibiliser.
En plus des documents à remplir, il y a des délais à respecter. Peux-tu en dire plus sur ces délais, notamment pour l’aide exceptionnelle et d’autres types d’aides ?
Christèle Beuzelin: Pour l’aide exceptionnelle, il faut déclarer l’alternant dans les 5 jours suivant le début de son contrat auprès de l’opérateur de compétences. Ces opérateurs sont relativement flexibles, car il peut être difficile de réunir tous les documents à temps.
En revanche, pour les aides de France Travail et les emplois francs, la demande doit être envoyée dans le mois suivant la signature du contrat, sans quoi aucune aide ne sera versée. Cette aide est versée semestriellement, contrairement à l’aide à l’alternance qui est mensuelle.
Christelle Dechelette: Il y a donc de nombreuses petites nuances et changements constants à gérer. Est-ce qu’il y a d’autres délais à respecter une fois les premiers remplis ?
Christèle Beuzelin: Pour l’aide à l’alternance, ce n’est pas toujours nécessaire, mais pour l’aide emploi franc, oui. Comme l’aide est versée semestriellement, il se peut que le salarié ne soit plus dans l’entreprise.
France Travail doit vérifier si le salarié est toujours présent, ce qu’on appelle actualiser son salarié. L’employeur a deux mois pour déclarer son alternant. Passé ce délai, l’aide est perdue.
Christelle Dechelette: Donc tous les efforts initiaux sont perdus. Encore une fois, il faut un suivi constant, ce qui est difficile avec les services RH qui ont d’autres priorités comme la formation.
Christèle Beuzelin: Exactement. De plus, il n’y a pas de système d’alerte pour prévenir des délais de déclaration.
Les différents obstacles rencontrés dans l’obtentions des aides à l’embauche
Christelle Dechelette: Peux-tu partager ton expérience sur d’autres obstacles rencontrés par les entreprises concernant les déclarations d’alternance ?
Christèle Beuzelin: Oui, chaque mois, il faut vérifier que l’alternant a bien reçu son aide de 500 euros. Des anomalies comme une DSN mal renseignée ou un CERFA incorrect peuvent bloquer les paiements. Sans un suivi rigoureux, l’employeur peut manquer des aides.
Christelle Dechelette: Les CERFAs changent souvent, avec de nouvelles rubriques à renseigner, ce qui complique les choses. La DSN est aussi un sujet complexe. Sans une déclaration de paie correcte, l’employeur peut rencontrer des anomalies et perdre du temps.
Christèle Beuzelin: Ces anomalies peuvent bloquer jusqu’à 30% des aides, ce qui est significatif pour les grands groupes.
Christelle Dechelette: Quels sont les enjeux financiers des aides par rapport au coût du recrutement ?
Christèle Beuzelin: Pour un groupe de 5000 salariés, avec 5% d’alternance, cela représente 250 alternants et 1,5 million d’euros d’aide. Pour une entreprise de 500 salariés, c’est 150 000 euros pour 25 alternants.
Christelle Dechelette: Donc cela représente environ 20% du coût salarial chargé des alternants ?
Christèle Beuzelin: Oui, et avec la contribution supplémentaire à l’apprentissage, cela fait une économie de 40% du budget. Au final, 60% du budget du recrutement des alternants est couvert par ces aides.
Christelle Dechelette: Merci pour ces explications concrètes. Que fait le gouvernement pour aider les entreprises au quotidien ?
Christèle Beuzelin: Il y a les sites d’information, et chaque fin d’année, il faut surveiller les décrets sur le renouvellement des aides. Par exemple, un récent décret a supprimé l’aide de 6000 euros pour les contrats de professionnalisation. Le ministère du Travail organise aussi des webinaires sur LinkedIn, en partenariat avec l’agence de services et de paiement.
Christelle Dechelette: En conclusion, ces aides sont cruciales pour les entreprises et représentent des enjeux financiers importants. Elles ont transformé l’accès au travail pour les jeunes et facilité des formations plus concrètes. Cependant, avec un environnement en constante évolution, les services RH doivent être agiles. Merci Christelle pour cet échange et ces informations précieuses.
Christèle Beuzelin: Avec plaisir.
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