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La voix des RH : la prévention des risques en entreprise – Partie 2

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prévention des risques en entreprise – Partie 2

Des échanges concrets et dynamiques sur les enjeux RH, des réponses pragmatiques et novatrices apportées par des experts… découvrez « La voix des RH » notre chaîne de podcasts Ayming !

Ecouter le podcast  » la voix des RH « 

La prévention des risques en entreprise est un sujet qui concerne tous les acteurs du monde du travail, qu’ils soient employeurs, salariés, managers ou consultants.

Comment identifier, évaluer et réduire les risques professionnels ? Quelles sont les bonnes pratiques et les outils à mettre en œuvre ? Quels sont les bénéfices d’une culture de sécurité juste et d’un courage managérial ?

Pour répondre à ces questions, nous vous proposons de découvrir l’épisode 2 sur la prévention des risques en entreprise. Un épisode de notre podcast « La voix des RH ».

Découvrez les échanges passionnants entre Daniela MARGITICAN, experte risques professionnels et Patricia MONNIER, experte prévention et consultante qualité de vie au travail, chez Ayming, depuis 18 ans. Vous y apprendrez :

  • Pourquoi et comment modifier la culture d’entreprise pour atténuer les risques en entreprises ? Nous expliquerons pourquoi ce changement de paradigme n’est pas antinomique avec la culture de performance.
  • En quoi et comment le manager peut-il trouver sa place dans la gestion d’une politique de prévention des risques ? Comment les impliquer et les aides ?
  • L’une des objections des managers est de dire que les comportements n’évoluent pas ? Est-ce que les managers peuvent se lasser de conduire cette politique de prévention ? Comment la Direction peut-elle aider ?
  • Est-ce qu’il ne faudrait pas intégrer les managers dès les étapes préalables de la réflexion sur la politique de prévention ? Ne serait-ce pas un moyen d’y apporter davantage de sens ?

Bonne écoute ! 🎧

Abonnez-vous pour ne rater aucun épisode. Pour ceux qui apprécient nous lire, retrouvez l’intégralité de leurs échanges ci-dessous. 

Ecouter l’épisode 2 « La voix des RH » sur la prévention des risques en entreprise

 

Daniela Margitican : J’ai le plaisir de vous retrouver pour la suite de notre série de podcasts sur la prévention des risques professionnels. Dans la première partie, nous avons vu, malgré une amélioration des statistiques d’accidentologie, qu’il reste encore beaucoup de chemin à parcourir pour les entreprises et les salariés français en matière de prévention des risques professionnels, tant au niveau de leur perception du sujet que des comportements.

Dans cette seconde partie, nous allons parler de la culture prévention et du rôle du manager dans le déploiement de la politique d’entreprise sur le terrain.

La prévention des risques, ça repose d’abord sur une culture d’entreprise mature.

Daniela Margitican : Patricia, pour toi, la culture d’entreprise est un facteur essentiel pour espérer une baisse constante et pérenne de l’accidentologie.

Néanmoins, cela peut faire peur, car une culture d’entreprise, c’est quand même long et fastidieux à modifier.

Le fait que tu nous dises que la baisse de l’accidentologie, ça passe par une modification de la culture d’entreprise, ça peut parfois paraître contradictoire avec les enjeux des entreprises, de performance, d’efficacité, de besoins de ressources, qui sont eux à court termes.

Est-ce que tu peux nous expliquer en quoi la modification de la culture d’entreprise est essentielle pour progresser en prévention des risques ?

Et de quelle façon est-elle compatible avec une entreprise qui continue à bien fonctionner, à faire du profit et à poursuivre ses objectifs ?

Patricia Monier : Alors, la culture de la prévention est en lien avec la culture d’entreprise et fait partie intégrante de la vie de l’entreprise.

Parfois, cette culture peut être préhistorique : « tant que tu ne t’es pas fait mal, c’est que tu ne travailles pas » ; «  c’est le métier qui rentre… » ; « c’est la fatalité »

Ce sont des choses qu’on entend de moins en moins et c’est tant mieux.

À l’opposé, la culture peut être extrêmement mature : « Il est évident que se faire mal ou même faillir se faire mal est quelque chose d’absolument pas envisageable. »

Les entreprises vont alors se placer sur un curseur allant de « on produit » à « on fait de la sécurité ». Et c’est ce chemin, jusqu’à une culture de la sécurité très mature, qui est long.

Mais au fait, la culture de la sécurité en entreprise, qu’est-ce que c’est ?

Patricia Monier : La culture de la sécurité, selon l’institut pour une culture de la sécurité industrielle (ICSI), est définie comme un ensemble de manières de faire et de manières de penser largement partagées par les acteurs d’une organisation à propos de la maîtrise des risques les plus importants liés à ses activités.

Alors forcément, ça prend du temps pour faire bouger une culture, parce qu’il faut changer les façons de penser et les représentations de tout un chacun. Il faut également faire changer les pratiques et les comportements qui sont tous les gestes, les attitudes, tout ce qui est observable sur le terrain.

Donc ça va d’abord passer par changer les façons de se représenter le travail, de se représenter la sécurité, et on part de loin. Encore une fois, il est nécessaire de commencer par la tête, c’est-à-dire par la direction, parce que tant que la direction n’a pas changé sa représentation, la place qu’elle lui accorde, il est illusoire d’imaginer que ce sont les opérateurs qui vont le faire. Et puis évidemment, le rôle des managers est aussi essentiel, ils sont les relais.

Plus on va descendre, dans une logique de cascading, plus c’est compliqué, parce que plus on a de monde à faire bouger.

Les managers et leur rôle essentiel dans la prévention des risques en entreprise

Daniela Margitican : Dans le premier podcast, tu nous indiques que le manager a un rôle essentiel à tenir. Il est quelque part entre la direction, qui définit les stratégies et la politique de prévention, et le terrain.

Finalement, les salariés ont la charge de mettre en œuvre la politique de prévention qui est définie.

Aujourd’hui, comment impliquer les managers et comment les aider justement pour déployer cette politique de prévention ?

Une première objection que l’on va souvent entendre de leur part c’est qu’ils ne peuvent pas faire les deux : allier productivité et sécurité. Ils ont des objectifs très opérationnels, on attend d’eux une grande productivité, ils ont des contraintes au quotidien qui ne seraient, selon eux, pas compatibles avec le respect des procédures de sécurité.

Qu’est-ce que tu réponds à ça ? Est-ce que tu as des solutions à nous donner ?

Patricia Monier : La solution va dépendre du niveau de maturité de l’entreprise.

On va avoir des cas où les managers vont effectivement avoir cette objection tout simplement parce qu’ils n’imaginent pas que ce soit de leur ressort d’analyser un accident ou de mettre à jour un document unique. Ils ne se représentent pas comme étant représentant de l’employeur à leur niveau, mais doivent mettre en place des mesures nécessaires pour protéger la sécurité et assurer la santé des travailleurs.

Dans ce cas-là, on va déjà commencer par apporter des connaissances pour faire bouger leur représentation.

Ensuite, si on est avec une entreprise un petit peu plus mature où les managers ont quand même la connaissance de leur rôle, on peut humainement comprendre qu’il n’ait pas envie d’effectuer le travail qui est généralement porté par un préventeur.

Alors que le préventeur n’est qu’un fonctionnel, même quand il s’appelle responsable sécurité, il est un conseiller interne.

Le travail est quand même du ressort des managers, ça aussi il faut leur expliquer.

On va commencer aussi à leur apporter des éléments de conviction, puis des éléments d’implication concrète sur le terrain, et enfin on va leur donner des éléments de ROI.

Deux exemples :

  • Se former en tant que directeur de magasins sur l’analyse des accidents, ça prend du temps et ce n’est pas leur priorité puisque en tant que directeur de magasin dans la grande distribution, ils doivent d’abord se préoccuper de la rentabilité du magasin.

On leur rappelle donc qu’ils sont représentants de l’employeur et on leur donne quelques éléments : le coût des accidents du travail, le coût des absences, les impacts organisationnels… Là, on commence à avoir un peu leur oreille.

Ensuite, tout en prenant compte leurs réelles difficultés et leurs contraintes, on va les accompagner à mettre en place les choses de manière efficace et pragmatique afin d’être le plus proche possible de la finalité.

  • Un autre cas sur des exploitants dans une société de transport de personnes. Nous étions sur une mission de formation, de recueil des faits, d’analyse des accidents, alors qu’ils le faisaient déjà plus ou moins facilement, mais ils n’avaient jamais le temps de s’y mettre.

L’entreprise avait décidé que c’était vraiment de leur ressort. Donc il a fallu qu’ils y passent.

Je rappelle pourquoi c'est aux managers de le faire ? Ils sont représentants de l’employeur à leur niveau.

Je rappelle pourquoi c’est à eux de le faire ? Ils sont représentants de l’employeur à leur niveau.

Alors, tant qu’à le faire, autant le faire bien, parce que si on le fait très bien, on aura une analyse qui sera qualitative et on pourra identifier des causes. Ça permettra de diminuer le nombre d’accidents, donc ils auront moins à revenir sur le sujet.

De même, pour l’analyse d’accidents : analyser les accidents c’est aussi une façon de les éviter. Donc d’éviter aussi les impacts organisationnels qui vont s’en suivre.

C’est également, peut-être, de diminuer les tentations d’accident tendancieux. En mettant son nez dans le sujet, plutôt que de laisser n’importe quel salarié dire qu’il est tombé et que personne n’a rien vu à un moment donné.

Une fois qu’on explique, qu’on donne du sens, qu’on donne de la visibilité, qu’on parle de ROI et qu’on est vraiment orienté sur la finalité, ils appréhendent cette contrainte avec un petit peu plus de facilité ou en tout cas d’acceptation.

Et si, malgré tout, le comportement des salariés ne change pas ?

Daniela Margitican : Une autre objection qu’on peut entendre souvent des managers, c’est que même s’ils essayent de sensibiliser leurs collaborateurs au quotidien, qu’ils recueillent et analysent les accidents quand ils ont lieu, qu’ils ont beau se répéter, les comportements ne changent pas.

Donc le manager peut parfois se sentir un petit peu démuni

Il y a aussi une crainte : lorsqu’on essaye de faire des rappels à l’ordre, des observations, voir aller jusqu’à la sanction disciplinaire, on peut parfois être mis en cause en tant que manager.

Est-ce que là il y a un rôle aussi de l’entreprise pour les soutenir dans ces démarches et finalement les rassurer dans leur rôle de manager ?

Manager de proximité, c’est la plus mauvaise place, parce qu'on est vraiment entre le marteau et l'enclume.

Patricia Monier : Le manager ne peut pas être tout seul, ça c’est certain, et toutes les strates managériales intermédiaires sont concernées.

Manager de proximité c’est la plus mauvaise place parce qu’on est vraiment entre le marteau et l’enclume.

Donc, avant de demander des choses à ces strates-là, il convient de leur donner tous les moyens d’être en soutien et d’être complètement en cohérence au-dessus.

Pour terminer avec la sanction, il est clair que c’est une décision d’entreprise.

On a déjà vu des cas de managers, qui ont eu le courage managérial de poser une sanction tout à fait justifiée, qui n’ont pas été suivies ni par le n +1, ni par la DRH et qui se sont retrouvés complètement discrédités.

Là, ce n’est juste pas envisageable. D’autant que les salariés sur le terrain ne sont pas toujours très facilitants parce qu’ils cherchent aussi à en échapper.

L’entreprise d’une manière générale, doit être claire : le cadre doit être clair, la consigne doit être claire, pour que le rôle du manager soit facilité.

On demande beaucoup de choses aux managers de proximité. On leur demande d’encadrer, on leur demande de contrôler, on leur demande d’animer.

Or, ce sont souvent des gens issus du terrain, c’est-à-dire qu’ils se retrouvent dans des situations extrêmement difficiles : ils ont été collègues et sans être forcément exemplaires eux-mêmes.

Quand ils sont promus, ce qui n’est déjà pas toujours facile pour l’entourage, ils se mettent aussi à avoir des exigences qui ne sont pas tenables, puisqu’on peut leur remettre très facilement à la figure, qu’eux-mêmes n’étaient pas très exemplaires, et que, depuis qu’ils ont pris du galon, ils ont pris la grosse tête.

Là-dessus, il faut les accompagner et les former pour qu’ils puissent animer leurs équipes en toute sérénité.

Finalement, il faut donner du sens.

Daniela Margitican : Est-ce qu’on n’a pas intérêt à intégrer les managers dès la phase de réflexion pour établir et définir les politiques de prévention ? Quelles sont les priorités qu’on va se fixer et comment on va faire les choses ?

Est-ce qu’il n’y a pas des exemples où ils sont intégrés aux réflexions sur la politique de prévention ?

Pour que finalement, ils soient beaucoup plus enclins à les mettre en œuvre et pour qu’ils les perçoivent avec plus de sens…

Patricia Monier : Alors c’est ce qu’on essaie de faire.

Par exemple, on commence par le comité de direction : quels sont vos rôles, vos missions, les enjeux de la prévention, pourquoi vous avez intérêt à le faire, par quoi vous souhaitez commencer en fonction de vos contraintes :

La réglementation définit les grandes obligations et elles sont assez nombreuse : le document unique, l’accueil sécurité des nouveaux arrivants, les consignes de sécurité qui sont chronophages à établir, la gestion des entreprises extérieures, l’analyse des accidents…

Puis, on travaille sur les outils : comment on décline certains outils, comment on en crée d’autres, en restant très opérationnel. C’est-à-dire en luttant contre la tentation des préventeurs de fabriquer des usines à gaz dont il est le seul utilisateur.

Il s’agit de faire des choses pratiques, utiles, concrètes, facilement mises en œuvre et qui sont gérables, sans être chronophages, ni générer du reporting à outrance.

Daniela Margitican : Merci beaucoup Patricia pour toutes ces réponses très concrètes qui j’espère vont aider et permettre aux préventeurs, aux RH, mais aussi aux fonctions plus opérationnelles de trouver les bons outils pour déployer les politiques de prévention.

La semaine prochaine, on se retrouvera dans un nouvel épisode du podcast avec un nouvel invité : le docteur Gilles SCETBON. Nous échangerons toujours autour d’un sujet en lien avec la santé : les troubles musculo squelettiques et de toutes les conséquences de l’accidentologie.

Patricia Monier : Merci Daniela

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