Le passeport de prévention, en discussion depuis 2 ans, s’est précisé fin décembre dernier afin d’être opérationnel sur le mois d’avril 2023. L’objectif de cet outil est de regrouper à un seul endroit l’ensemble des données concernant les formations et qualifications en santé et sécurité au travail d’un travailleur.
Découvrez toutes les modalités de sa mise en place et de son utilisation au travers du décryptage de notre experte Carole Podymski, Consultante Référente Prévention.
1. Le passeport de prévention, qu’est-ce que c’est ?
2. Que contient le passeport de prévention ?
3. Qui sont les parties intéressées du passeport prévention ?
4. Quels sont les rôles détaillés de chacune des parties intéressées ?
5. Quelles sont les modalités d’accès à ce passeport de prévention?
6. Quelles sont les prochaines étapes du passeport de prévention ?
7. Textes de référence et préambule réglementaire
1. Le passeport de prévention, qu’est-ce que c’est ?
Ce qu’est le passeport de prévention
Le passeport de prévention est, et doit rester, un outil au service des employeurs et des salariés. Son objectif est de faciliter entre eux, la circulation de l’information sur les formations suivies, les compétences acquises et les certificats obtenus entre les acteurs concernés par la formation (notamment grâce à un portail d’information).
Ce que n’est pas le passeport de prévention
Dans cette logique, le passeport ne doit pas :
- Être un moyen de contrôle des compétences des salariés.
- Constituer un prérequis obligatoire à tout recrutement des salariés.
- Avoir pour finalité d’être un outil de contrôle des formations dispensées par l’employeur. Comme ce dernier renseigne le passeport de prévention, la priorité devra être donnée à son accompagnement, en particulier pour les TPE/PME.
- L’employeur reste libre de garder les supports qu’il utilise actuellement pour justifier de la réalisation des formations en cas de contrôle.
- Être confondu avec les droits du salarié attachés au CPF même s’il est intégré dans le même système d’informations. L’utilisation des droits CPF acquis par les salariés reste à l’unique appréciation de ces derniers.
2. Que contient le passeport de prévention ?
Le passeport de prévention contient les attestations, certificats et diplômes dispensés en interne au sein de l’entreprise, y compris à l’étranger ou en externe par le biais d’organisme de formation. Ces attestations, certificats ou diplômes permettent de s’assurer de la bonne réalisation de la formation dans les conditions fixées par la réglementation du code du travail ou garanties par tout autre dispositif de validation.
Il devra également contenir les informations suivantes :
- Les données relatives à l’identification de l’employeur, de l’organisme de formation et du titulaire du passeport de prévention,
- Les données relatives aux attestations, certificats et diplômes obtenus par le titulaire du passeport de prévention dans le cadre des formations relatives à la santé et à la sécurité au travail,
- Les certificats en santé et sécurité au travail obtenus par le titulaire du passeport de prévention et recensés dans son passeport d’orientation, de formation et de compétences.
3. Qui sont les parties intéressées du passeport prévention ?
Le titulaire du passeport de prévention (le travailleur)
- Peut inscrire dans le passeport de prévention des attestations, certificats et diplômes qui auraient été obtenus à l’issue de formations qu’il a suivies de sa propre initiative (article L.4141-5 du code du travail) ou avant la mise en place du passeport de prévention (délibération du 13 juillet 2022).
L’employeur
- Doit renseigner dans un passeport de prévention les attestations, certificats et diplômes obtenus par le travailleur dans le cadre des formations relatives à la santé et à la sécurité au travail dispensées à son initiative (article L.4141-5 du code du travail).
Les organismes de formation
- Doivent renseigner le passeport selon les mêmes modalités dans le cadre des formations relatives à la santé et à la sécurité au travail qu’ils dispensent (article L.4141-5 du code du travail).
4. Quels sont les rôles détaillés de chacune des parties intéressées ?
Les titulaires du passeport de prévention (les travailleurs)
Au titre des articles L. 4141-5 et L. 4111-5 du code du travail, le passeport de prévention vise les travailleurs et les demandeurs d’emploi.
C’est un outil géré par le salarié et c’est donc à ce dernier d’apprécier ce qu’il rend consultable/communicable par un employeur ou son délégataire, y compris :
- Les données que l’employeur n’y a pas versées,
- Les formations que le titulaire du passeport a suivies de sa propre initiative.
A noter :
- L’alimentation du passeport de prévention ne concerne pas les formations qui ont été dispensées antérieurement à la mise en œuvre effective de ce dispositif. Le travailleur conserve néanmoins la faculté d’y intégrer ces formations suivies antérieurement,
- Les modalités et conditions d’accès au passeport seront fixées par un arrêté à paraître (que ce soit un accord total ou partiel ou un refus d’accès),
- Le salarié doit être informé de l’alimentation de son passeport par l’organisme de formation ou de certification par le biais d’une notification électronique.
Les employeurs ou leurs délégataires
La délibération indique, sans donner plus de détails à ce sujet, qu’il convient de distinguer plusieurs situations « selon le statut juridique de l’employeur : l’entreprise de droit commun, les entreprises de travail temporaire, les entreprises étrangères intervenant en France ».
Pour optimiser la visibilité de l’employeur sur les formations qu’il a dispensées ou fait réaliser par un organisme de formation, l’employeur pourra activer un espace dédié d’information auquel lui seul, ou son délégataire, pourra accéder.
Les organismes de formation
Dans le cas des formations assurées par un organisme externe à l’entreprise, ce dernier devra alimenter le passeport de prévention du titulaire pour la formation qu’il aura assurée. Cette alimentation portera notamment sur l’attestation de suivi de formation, ou le cas échéant sur le certificat de réussite.
Pour les formations débouchant sur une certification, l’alimentation par l’organisme certificateur du passeport d’orientation[1], de formation et de compétences du salarié entrainera l’alimentation, par ricochet, du passeport de prévention.
Dans ce cadre, les organismes concernés devront informer l’employeur par tout moyen qu’ils ont effectivement alimenté le passeport. Dans le cas des formations organisées à l’initiative de l’employeur, cela se traduira par la mise en place d’un système de notification automatique sur l’espace dédié.
5. Quelles sont les modalités d’accès à ce passeport de prévention?
Le travailleur peut autoriser l’employeur à consulter l’ensemble des données contenues dans le passeport de prévention, y compris celles que l’employeur n’y a pas versées, pour les besoins du suivi des obligations de ce dernier en matière de formation à la santé et à la sécurité, sous réserve du respect des conditions de traitement des données à caractère personnel prévues dans la loi dite informatique et libertés (article L.4141-5 du code du travail).
Un demandeur d’emploi peut ouvrir un passeport de prévention et y inscrire les attestations, certificats et diplômes obtenus dans le cadre des formations qu’il a suivies dans les domaines de la santé et de la sécurité au travail (article L.4141-5 du code du travail).
- Le salarié peut donner son accord pour un accès, total ou partiel, par son employeur, au passeport le concernant, ou lui refuser cet accès. Les modalités de cet accord et les conditions de cet accès devaient (selon la délibération) être précisées par arrêté mais cette disposition n’a pas été approuvée par le décret n° 2022-1272 (point III de l’article 1er du décret).
6. Quelles sont les prochaines étapes du passeport de prévention ?
Entrée en vigueur et progressivité
En approuvant la délibération, le décret du 29 décembre 2022 confirme que le passeport de prévention devrait être opérationnel en avril 2023.
D’après les documents de la caisse des dépôts et consignations présentés lors du CNPST du 24 juin 2022 « Le passeport prévention se matérialisera d’abord par un site d’information livré en octobre 2022 puis par une ouverture effective en avril 2023 » (délibération du 13 juillet 2022).
Ce passeport doit se développer de façon progressive dans la mesure où il ne pourra pas intégrer d’emblée l’ensemble des « attestations, certificats et diplômes » (point 4 de la délibération du 13 juillet 2022).
Il est donc proposé d’intégrer dans un premier temps des formations qui peuvent être « transférées » aisément d’une entreprise à une autre c’est-à-dire les formations obligatoires en santé-sécurité visées par le code du travail (réalisées en interne ou en externe) :
- Amiante, travaux sous tension, travaux en hauteur, travaux hyperbares, appareils de levage ou équipement de travail mobile automoteur …,
(à l’exception des formations liées à la prise de poste de travail et à son évolution), - Les « formations non réglementées avec objectif précisé par la réglementation pour des postes qui nécessitent l’habilitation par l’employeur » (CACES, risque pyrotechnique).
7. Textes de référence et préambule réglementaire :
Textes de références
- Loi nº 2021-1018 du 2 août 2021 (loi santé au travail)
- Article L.4141-5 du code du travail relatif au passeport de prévention
- Article L. 6323-8 du code du travail relatif au passeport d’orientation, de formation et de compétences
- Délibération du CNSPT (Comité national de prévention et de santé au travail) du 13 juillet 2022 (à la suite de la réunion du Comité du 24 juin 2022)
- Décret n° 2022-1712 du 29 décembre 2022 approuvant la délibération du CNSPT
Préambule et rôle du CNSPT
L’article L.4141-5 du code du travail prévoit que les modalités de mise en œuvre du passeport de prévention et de sa mise à la disposition de l’employeur soient déterminées par le CNSPT (comité national de prévention et de santé au travail) puis approuvées par voie réglementaire. C’est chose faite avec la délibération survenue le 13 juillet 2022, approuvée par le décret du 29 décembre 2022.
NB : cet article prévoit également que le CNSPT assure aussi le suivi du déploiement du passeport de prévention
Pas d’arrêté supplémentaire à paraitre
La délibération du 13 juillet 2022 prévoyait la parution d’un arrêté relatif aux modalités et conditions d’accès au passeport et aux informations recensées dans celui-ci. Le décret n° 2022-1712 du 29 décembre 2022 n’a pas validé la parution d’un texte supplémentaire sur le sujet.
[1] Rappel concernant le lien entre le passeport d’orientation et le passeport de prévention (cf article L.4141-5 du code du travail) : lorsque le travailleur ou le demandeur d’emploi dispose d’un passeport d’orientation, de formation et de compétences, son passeport de prévention y est intégré. Il est mis en œuvre et géré selon les mêmes modalités. Ce passeport « d’orientation, de formation et de compétences » recense les formations et les qualifications suivies dans le cadre de la formation initiale ou continue ainsi que les acquis de l’expérience professionnelle (voir article L. 6323-8 du code du travail).
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